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Colonel Spontini

Pourquoi le pouvoir dirait-il la vérité ?

QUESTION DE CONFIANCE

Publié le 26 Décembre 2022 par Colonel Spontini

QUESTION DE CONFIANCE

 

 

QUESTION DE CONFIANCE

 

 

Placid: Moi quand je rencontre quelqu’un, je lui fais confiance tout de suite.

Muzo: T’es fou !

Placid: Mais non, ça met à l’aise.

Muzo: Tu ne sais pas qui c’est.

Placid: On fait connaissance.

Muzo: Et si il veut t’entuber ?

Placid: Pourquoi voudrait-il m’entuber ?

Muzo: Si il veut pas t’entuber peut-être qu’il voudra t’enfumer.

Placid: Personne ne m’a jamais enfumé.

Muzo: Parce que tu ne t’en es pas rendu compte.

Placid: Tiens hier, j’ai fait la connaissance du voisin du sixième.

Muzo: Celui qui déplace des meubles la nuit ?

Placid: Non ça c’est celui du dessus mais c’était dans mon rêve !

Muzo: Alors toi c’est dans tes rêves que t’es méfiant !

Placid: Oui mais je n’ai pas recommencé.

Muzo: Recommencé quoi ?

Placid: À rêver que le voisin du dessus déplace des meubles la nuit.

Muzo: Ça veut pas dire qu’il te veut du bien.

Placid: Non mais celui du sixième est très sympathique, il travaille aux impôts.

Muzo: Aux impôts ! Et tu parles avec un type qui travaille aux impôts ?

Placid: Oui, il m’a expliqué des trucs.

Muzo: Quel genre de trucs ?

Placid: Eh bien... ça m’ennuie d’en parler vu que je lui ai promis de le garder pour moi.

Muzo: Pourquoi, c’est des trucs pour payer moins d’impôts ?

Placid: Eh bien... genre comme ça... tu vois je ne peux rien dire.

Muzo: Tu te méfies de moi ?

Placid: Bien sûr que non !

Muzo: Un vieil ami comme moi !

Placid: Bon eh bien viens que je t’explique.

 

Muzo se rapproche de Placid qui se met à lui expliquer des choses à l’oreille.

Quand il a fini, Muzo réfléchi en silence. Puis:

 

Muzo: C’est un piège. Il veut te piéger !

Placid: Mais non !  Pourquoi veux-tu qu’il me piège ?

Muzo: Pour te coincer ! Comme ça il se fera bien voir de ses supérieurs et il obtiendra une promotion.

Placid: Mais je ne paie pas d’impôts !

Muzo: Hmm... dans ce cas...

Placid: Dans ce cas quoi ?

Muzo: C’est toi qui pourrais le piéger.

Placid: Pour quoi faire ?

Muzo: Tu dénonces un agent assermenté qui t’a mené sur la voie de la délinquance.

 

Les deux restent à méditer en silence.

 

Placid: Au fait tu en es où de ton procès ?

Muzo: Mon avocat est véreux.

Placid: J’en connais un qui est très bien.

Muzo: Tu as utilisé ses services ?

Placid: Non, pas besoin, il habite au septième.

Muzo: Et il est sympathique non ?

Placid: Mais oui, comment tu as deviné ?

Muzo: Il ne déplace pas de meuble la nuit ?

Placid: Non, en effet, comment tu as deviné ?

Muzo: C’est le voisin du sixième qui te l’a dit.

Placid: Tu devines tout toi !

Muzo: C’est pour ça qu’on me la fait pas !

 

Placid: Tiens je ne t’ai pas dit mais je rentre de vacances.

Muzo: C’était bien ?

Placid: Oui, super, mais l’avion a eut six heures de retard.

Muzo: Attaque les en justice pour te faire rembourser !

Placid: Ça y est, c’est fait.

Muzo: C’est fait quoi ? L’attaque ?

Placid: Non le remboursement.

Muzo: Y t’ont remboursé ?

Placid: Oui.

Muzo: Sans que tu demandes ?

Placid: Oui et...

Muzo: Et quoi ?

Placid: Ils m’ont donné le double.

Muzo: Le double de quoi ?

Placid: Du prix du billet !

Muzo: Y sont cons ou quoi ! Tu ne trouves pas ça louche ?

Placid: Si tu veux tu viens avec nous la prochaine fois, y’a suffisamment d’argent.

Muzo: Sûrement pas, y sont tout le temps en retard !

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Le bas n'est pas en haut

Publié le 24 Décembre 2022 par Colonel Spontini

Le bas n'est pas en haut

Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, cette toile était présentée au public à l'envers, ce qu'une conservatrice vient de découvrir par hasard.

 

Un tableau du peintre néerlandais abstrait Piet Mondrian est accroché depuis 77 ans dans le mauvais sens, ont découvert cette semaine les responsables du musée Kunstsammlung de Dusseldorf, où il est actuellement exposé. Une grande rétrospective du peintre néerlandais a débuté samedi dans cet établissement, avec pour point d'orgue la présentation du tableau New York City 1, réalisé en 1941. Or, cette peinture est exposée à l'envers, a révélé le musée cette semaine.

 

«Sur une photo de 1944, j'ai vu que la toile était dans l'autre sens sur un chevalet. Ça m'a intrigué», a déclaré samedi dans une interview au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung Susanne Meyer-Büser, la commissaire de l'exposition. La peinture, composée de plusieurs traits rouges, jaunes et bleus se croisant en angles droits, a ensuite été exposée au Moma de New York «un an plus tard», dans le mauvais sens, selon Susanne Meyer-Büser. Lorsqu'il a été transmis au musée de Dusseldorf en 1980, le tableau a été redisposé de la même façon.

 

L'erreur pourrait provenir du fait que «la peinture n'avait pas de signature», selon Susanne Meyer-Büser. Son sens a donc été déterminé par «le nom de l'artiste inscrit au dos du cadre par l'administrateur de la succession», lors de la mort de Mondrian, en 1944.

Piet Mondrian, né en 1872, est l'une des principales figures du mouvement artistique néerlandais appelé «De Stijl» (Le style, en français), connu pour ses lignes horizontales et verticales et ses couleurs primaires. En 1940, le peintre est parti pour les États-Unis à New York. Les quadrillages rectilignes de ses peintures sont inspirés du tracé et des gratte-ciel de la ville américaine.

Il est mondialement connu notamment pour sa toile Victory Boogie Woogie, considérée comme l'une des œuvres les plus importantes du XXe siècle.

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Où vont nos impôts ?

Publié le 22 Décembre 2022 par Colonel Spontini

Où vont nos impôts ?

Sur 1000 euros d'impôts et cotisations sociales payés par les ménages et par les entreprises, l'usage des deniers publics peut révéler des surprises.

 

Les recettes fiscales seront supérieures de 3 milliards d'euros aux prévisions en 2022 et la France encaissera 9 milliards d'euros de cotisations sociales et de CSG supplémentaires, s'est réjoui dans Le Figaro le ministre délégué aux Comptes publics, Gabriel Attal. Pourtant, les Français constatent chaque jour la dégradation de la qualité des transports collectifs - en particulier en Île-de-France -, les tensions à l'hôpital public, ou encore la formation express de contractuels pour pallier la pénurie d'enseignants.

Résultat, beaucoup se demandent où peut bien passer l'argent public. Ancien rapporteur général de la Cour des comptes et président de Fipeco, site d'information sur les finances publiques, François Ecalle, s'est livré à un petit jeu de ventilation à partir des données 2021 de l'Insee, dont il a donné la primeur au Figaro.

Pour réaliser son étude, le patron de Fipeco s'est appuyé sur la décomposition des dépenses publiques réalisée par les statisticiens nationaux. Ceux-ci découpent le budget en «fonctions», qui «correspondent pour la plupart à des politiques publiques». Un moyen de constater à quoi sert l'argent public, «en supposant que les prélèvements obligatoires et les autres ressources des administrations publiques, notamment l'endettement, financent les mêmes dépenses, ce qui constitue une approximation raisonnable».

Sur 1000 euros de prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales) l'an dernier, plus de la moitié (57,3%) soit 573 euros, sert à financer le système de protection sociale tricolore. Sur cette somme, 248 euros sont affectés au paiement des retraites, qui s'affirment donc comme le premier poste de dépenses publiques. Vient ensuite la santé, avec 208 euros : 25 euros servent à acheter ou rembourser des médicaments et autres biens médicaux (appareillages…), 60 euros à rembourser les services de santé en ambulatoire, 63 euros vont aux hôpitaux (dont 38 euros pour couvrir leurs dépenses de personnel) et 51 euros sont des indemnités (arrêts maladie, invalidité…). Il faut aussi compter 39 euros pour les allocations-chômage ou encore 37 euros pour le soutien aux familles (allocations familiales, aides à la garde d'enfants, crèches etc.).

 

Une fois la protection sociale financée, sur les 1000 euros de départ il ne reste plus que 427 euros. Ils sont affectés pour 117 euros au soutien aux activités économiques: très hétérogènes, celles-ci englobent tant les transports (construction et entretien des routes…) que les aides aux ménages et subventions aux entreprises (aides à l'emploi, à l'agriculture, aux énergies renouvelables…). Il faut aussi compter 72 euros pour les «services généraux» qui recouvrent les fonctions supports des administrations (Présidence, Parlement et services du Premier ministre, assemblées des collectivités locales…). À cela, il faut encore ajouter 26 euros d'intérêts de la dette publique.

 

Il reste ensuite 89 euros pour l'enseignement, dont 24 euros vont vers les écoles, 38 euros vers les collèges et lycées, 11 euros vers le supérieur et 11 euros vers les services annexes (cantines, résidences universitaires, bibliothèques…). La masse salariale représente 71 % du coût total de cette politique et ce ratio décroît du primaire au supérieur. Au final, il reste 30 euros pour la défense, 29 euros pour la «sécurité intérieure et justice», 24 euros pour la culture, le sport et les loisirs, et 18 euros pour la protection de l'environnement.

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21 - N'oublie pas ta douleur - 21

Publié le 21 Décembre 2022 par Colonel Spontini

21 - N'oublie pas ta douleur - 21

21

 

— Que pensez-vous de « les français sont des bœufs » mon cher Maurice ?

— « Bœufs »  et « Beaufs » c’est presque pareil.

— Alors disons « les français sont des veaux » ?

— C’est mieux mon Général.

 

Pasquier manœuvrait en virtuose sa Jeep dans la circulation chaotique d’Alger. Entre camions militaires ou civils, berlines et chariots tirés par des bœufs, des chevaux voire des humains, il fallait une attention de tous les instants pour éviter l’accrochage. Morlet se tenait à son siège pour rester assis dans celui-ci plutôt que d’être éjecté sur la chaussée. Ils grimpaient vers les hauteurs dans la rue d’Ornano en direction du Palais d’Été. Ils arrivèrent ainsi devant le bâtiment où tous les pouvoirs s’étaient installé dans l’histoire d’Alger.

— Regardez Colonel, ils ont mis des fusillers marins.

En effet, les deux troufions de garde à l’entrée protégée d’une grille étaient en tenue blanche et coiffures à pompon.

— C’est nouveau ?

— Oui, avant c’étaient des Spahis.

— De Gaulle préfère les fusiliers on dirait.

— Je ne vous le fait pas dire mon Colonel.

Il stoppa le véhicule devant une guérite d’où sortit un sous officier, lui-même vêtu de blanc:

— Nous venons voir le lieutenant Gayssot.

— Attendez.

Des camions, devant le grand édifice d’allure princière et orientale, attendaient pendant que des hommes de troupe en sortaient des cartons et des malles. Un peu plus loins, d’autre camions étaient en train d’être remplis du même genre de matériel.

— On dirait que Giraud cède le terrain.

— Une partie du terrain, les gaulliste revendiquent l’autre partie.

— La fusion va être difficile.

— Giraud s’est bien mouillé avec Vichy mais il est soutenu par Eisheinoer.

Un nouveau sous officier en tenue blanche arriva:

— Pasquier, vous nous amenez notre aviateur ?

— Oui lieutenant, je vous présente le Colonel Morlet.

— Lieutenant-colonel.

— Bienvenue Colonel, votre arrivée en chasseur italien n’est pas passée inaperçue.

— Je suis en mission et je souhaite contacter le Renseignement.

— Je sais, il faut que vous voyiez Soustelle.

— Il est là ?

— Eh bien, tout le monde s’agite beaucoup par ici, on est en pleine installation. Soustelle n’est pas ici pour le moment, vous devriez aller voir aux Glycines.

— Aux Glycines ?

— Oui, à la villa « Les glycines », ce n’est pas loin, Pasquier connaît le chemin.

Morlet regarda Pasquier qui cligna de l’œil en signe d’acquièsement.

Dans la voiture, son chauffeur lui expliqua qu’il s’agissait de la résidence du Gouverneur et que le nouvel occupant s’appelait de Gaulle et qu’il avait emnénagé là avec sa famille.

Une belle villa toute blanche, cernée d’un jardin de palmiers et de bougaivillers, lui-même entouré d’un mur de bonne hauteur. Nouvel arrêt devant une guérite, après quoi les deux hommes furent autorisé à pénétrer dans le bâtiment. Un homme brun à lunettes et cheveux en brosse, de taille moyenne à la figure ronde vint les accueillir.

— Jacques Soustelle, bienvenue.

— Lieutenant colonel Morlet il faut que je vous parle monsieur.

— Suivez-moi.

L’homme en costume blanc les conduisit dans un patio aux murs blanc, carrelé de bleu et blanc, avec une petite fontaine au milieu faite d’un jet d’eau dirigé vers le haut. Un enchantement de calme et de fraîcheur.

— Ici nous serons à l’aise, je n’ai pas encore de bureau.

— Vous réorganisez les services Monsieur Soustelle ? demanda Pasquier.

— Vous êtes des nôtres me semble-t-il ? Je vous ai déjà vu.

— Tout juste Monsieur, il faut faire le tri.

— Ce n’est pas facile, jai besoin de l’aide de types comme vous.

— Vous l’aurez, soyez-en sûr. Mais voici le problème pour lequel nous sommes ici.

— Votre avion a disparu, dit-il se tournant vers Mortier.

— Vous êtes au courant ?

— C’est mon métier.

— Oui, on nous l’a volé. Il y avait au moins deux types dans le coup, peut-être trois.

— Ils n’ont pas atterri chez nous, ni en Algérie, ni à Fort Lamy ni à Brazzaville ni nulle part dans l’empire français, j’ai vérifié.

— Je veux récupérer mon appareil, il appartient à la France Combattante, et faire payer ces lascars pour leur forfait.

— En plus ils nous cachent quelque chose, vous avez trouvé une grotte dans le Fezzan ?

— Oui, très profonde et très vaste et aménagée en plus pour pouvoir y vivre sous terre.

— Vous n’avez pas eu le temps de fouiller.

— Non Monsieur, nous n’avions plus de lumière et, quand nous sommes remontés, nous avons entendu le moteur du Blenheim en train de décoller. On ne pensait plus au repaire souterrain.

— Construit par les italiens ?

— Impossible à dire.

À ce moment un planton se présente:

— Le Général vous attend Monsieur.

— Ah ! Ça c’est un impératif catégorique ! Il faut que j’y aille. Mais venez demain après-midi au 28 rue Michelet. On est en train d’y eménager dans un appartement, c’est au troisième étage. Vous connaissez Pasquier ?

— Nous y serons Monsieur, n’en doutez pas.

Soustelle regarda sa montre:

— Disons 16h.

Puis il se leva vivement pour aller retrouver de Gaulle.

Il courait presque.

La semaine précédente, il était encore à Londres.

Le soir, le nouveau camarade de Morlet était resté avec lui et l’avait conduit dans une petite gargotte en terrasse devant la mer, au lieu-dit Pointe Pescade.

Monsieur Cavoglio le patron vint leur proposer des rougets grillés avec un blanc élevé dans l’arrière pays. Il exhalait la bonne humeur et la joie de vivre, il partagea l’apéritif avec ses clients:

— Vous n’avez pas été inquiété ici en tant qu’italien.

— Non, pas du tout, les vichystes étaient copains avec le Duce, ne l’oubliez pas.

— Et maintenant ?

— Beaucoup de choses sont en train de changer mes amis. Avez-vous vu tous ces américains qui vont bientôt débarquer chez nous.

— Chez vous ?

— En Italie.

— Et ici ?

— Ici, je crois que le pouvoir est en train de changer de mains, vous ne croyez pas ?

Morlet et Pasquier se regardent.

— Oui, on dirait en effet.

— Et il est très possible qu’on redeviennent alliés.

— Fichtre.

— Vous ne savez pas ?

— Vous allez nous le dire.

— On dit que le Duce n’en a plus pour longtemps.

— Maztte !

Tout le monde se regarda et Morlet dit:

— Franchement, je préfère me battre avec les italiens que contre.

— Et nous, on préfère se battre avec tous les français, pas contre certains d’eutre aux, ajouta Pasquier.

— Ça c’est bien vrai ! enchérit le patron, vous avez raison de dire ça Monsieur le militaire.

Et il regana sa cuisine, interpelé par une voix féminine criant « Luigi ! ».

Pasquier remplit les verres en disant:

— Je dis ça parce que Giraud et ses sbires ont persécuté les juifs de 42., ceux du putch.

— Ils ont bloqué Alger pour permettre aux Alliés de débarquer ?

— Oui, en novembre. Un coup d’éclat magistral. L’armée d’Afrique, celle cantonnée ici, n’a pas pu bouger et toutes les batteries braquées sur la mer ont été neutralisées. Des petits jeunes avec un culot de tous les diables !

— Remarquable, remarquable.

— Oui mais après, les vichystes les ont envoyés dans des camps, et on ne peut pas dire que Giraud ait cherché à l’empêcher. Des camps où ils auraient pu mourir tellement ils étaient maltraités. heureusement qu’aujourd’hui ils sont tous libres.

Cavoglio revint avec une bouteille d’anis « La colombe »:

— Voilà ce qu’on sert aux amis et aux amis de la paix.

— À la notre !

— Mon fils faisait partie des résistants du 8 novembre 1942, rerpit Luigi, il était à la poste centrale, pour contrôler les communications. C’est un type gominé qui l’a descendu, cette nuit-là.

— Comment savez-vous qu’il était gominé ?

— Parce que les copains de Luca m’ont donné son signalement.

— Vous l’avez retrouvé ?

— On s’y est tous mis et finalement je l’ai eu au bout du canon de mon révolver.

— Et ?

— J’ai tiré. Il avait mis de la gomina jusqu’au dernier jour de son existence.

 

Les FFL avaient bien fait les choses parce qu’après le repas, Morlet fut conduit par son guide au « Renaissance » pour « voir du monde ». Derrière un digestif, celui-ci put en effet constater qu’il y avait de la compagnie ! Hommes en costume, femmes en robes de soirée, officiers en uniforme, les soirées algéroises étaient certainement plus gaies et fréquentées qu’à Paris. Qui aurait pu penser qu’on était à la veille du départ pour un débarquement en Sicile ? D’ailleurs personne n’était au courant du projet. Les Alliés avaient su garder le secret si bien que l’ambiance de cette soirée ne pouvait mettre aucune puce sur aucune oreille. Comment Cavoglio avait-il pu avoir vent de l’opération ? Sans doute une rumeur parmis beaucoup d’autres. Les deux hommes quittèrent les lieux sur les minuits pour aller rue Victor Hugo où Pasquier laissa le pilote occuper un appartement qui avait servi aux auteurs du putch, en novembre 42. Tout était très propre, il y avait même des provisions et du café.

 

Au matin, Pasquier n’était pas là. Son officier supérieur, celui-là même qui était d’accueil à l’aéroport, n’avait pas apprécié qu’il passe son temps avec l’aviateur de la France Libre. Il l’avait donc consigné à l’état-major. C’est au téléphone que l’un fut prévenu par l’autre. Une conversation très brève, manifestement écoutée par d’autres oreilles. Morlet demanda à la boulangère du coin comment trouver la rue Michelet.

— Mais c’est à côté, cher monsieur, on voit que vous n’êtes pas du coin ! Vous venez d’où ?

— Heu… du désert.

— Ah oui, je vois.

Il repéra le bâtiment où il devait se rendre et partit déambuler dans les rues.

Toute cette agitation le changeait du désert, sans aucun doute, mais il se demandait s’il ne préférait pas le désert. Il arriva au Square Bresson et s’assit sur une terrasse.

Au bout d’un petit quart d’heure, une voix féminine l’interpela:

— Je peux m’asseoir ?

Il leva les yeux sur une femme fort élégante et fort séduisante. Chassait-elle un gibier dans son genre ? pensa-t-il instantanément. Même s’il avait perdu l’habitude de la fréquentation des femmes, il n’était pas prêt à tomber sous le charme de la première venue.

Mais elle en avait du charme, il devait bien le reconnaître. « Elle le sait trop bien et elle en joue » se fit-il la réflexion. Bref il était sur ses gardes.

— Je ne veux pas vous déranger mais les autres sièges sont pris, ne faites pas attention à moi.

Après tout une petite conversation avec une nouvelle venue, cela ne prêtait guère à conséquences.

Il la détailla du regard. Brune, maquillée légèrement, dans une robe blanche, le corps épanoui et généreux, des yeux pervenche comme on n’en voit pas souvent. Elle savait pertinement que François la regardait et elle savait aussi faire comme si elle ne savait pas. Tout comme lui. Petit jeu propice à la détente. Ce badinage muet le changeait radicalement de tout ce qu’il avait vécu depuis… depuis combien d’années au fait ? Et il regardait cette femme qui s’offrait à lui moyennant quelques refus potentiels qui risquaient de rester potentiels tellement elle cachait peu ses intentions. Mais quelles étaient vraiment ses intentions ? Il se regarda mentalement dans un miroir, où il s’observa: grand, robuste, jeune, plutôt bel homme, avec sa chemise kaki et son pantalon de même couleur, il affichait toutes les caractéristique d’un type  de la France Libre, certainement pas un vichyssois. Et si elle faisait du renseignement pour le camps adverse ? Les confidences sur l’oreiller et autres situations propices à la fuite d’informations sensibles. « Tu étais à Sehba ? C’est comment là-bas ? Tu as du en baver pour arriver jusqu’ici, dans quel avions tu m’as dit ? Ils étaient nombreux là-bas ? » etc… voilà tout ce que Morlet se mit à imaginer alors que la jeune femme n’avait pas ouvert la bouche. Il était devenu paranoïaque, voilà ce qu’il était devenu. Il se dit que ces années de combat l’avaient rendu méfiant, au delà du raisonnable. Il décida de contrer ses pensées négatives:

— Vous vivez ici ?

— Non pas sur cette terrasse, dit-elle avec humour, mais oui, pas loin, dans la rue Bugeaud.

Cela le fit rire et sa réserve commença à se dissiper.

— Jolie ville Alger, un peu bruyante, mais jolie.

— C’est comme ça dans toutes les villes, à Paris c’est pareil, à Rome…

— Vous êtes allée à Rome ?

— Oui, avec mon mari et vous, vous connaissez des capitales ?

— Paris comme vous et Bruxelles où je suis allé avec ma femme.

— Vous avez des enfants ?

— Oui, deux, et vous ?

— Moi, non, dit-elle avec une pointe de mélancolie.

— Ça viendra, dit-il plein de chaleur.

— Peut-être…

— Votre mari est mobilisé ?

— Oui, dans l’Armée d’Afrique mais…

— Mais ?

— Cela fait trois mois maintenant que je n’ai pas de nouvelles.

Elle avait regardé sa montre comme si celle-ci donnait les mois.

— Mon Dieu ! Je vous plains !

— C’est la guerre.

Il voyat bien qu’elle avait perdu son sourire et, pris de court, il lui demanda le nom de l’époux:

— Antoine Carcopino.

— Écoutez, je vais voir… comme je suis dans l’armée aussi, pas la même bien sûr, mais on ne sait jamais.

— Ne vous mettez pas en peine monsieur heu ?

— François, c’est plus simple.

— Il n’en vaut pas le coup.

— Il n’en vaut pas le coup ?!

— C’est un salaud François, je suis mariée à un salaud, ni plus ni moins.

— Mais… pourquoi ?

— Oh là là, il y a des gens qui ont pris les armes et certains se sont fait arrêter et ils sont tombés dans les mains d’Antoine. Ils n’en sont pas tous sortis vivants.

François resta sans voix, sauf pour héler le serveur et commander « la même chose ».

Le flirt à peine ébauché, entre deux êtres qui n’étaient pas insensibles l’un à l’autre, dut s’arrêter là. La cruauté de la guerre ne fait pas bon ménage avec la légèreté amoureuse et François ne se sentait pas de profiter du désarrois de Marianne. Oui elle s’appelait Marianne et elle confessa sa préférence pour la France Libre. Elle ne souhaitait pas vraiment le retour de son mari, elle souhaitait même… comment dire ? … qu’il continuât de … ne pas revenir. Elle avait passé son bras à celui de François et c’est comme cela qu’ils se promenèrent pendant deux heures.

— Maintenant je dois te laisser Marianne, j’ai un rendez-vous.

Elle ne posa aucune question, sa discrétion fut totale et il put la laisser là pour rallier la rue Michelet. Ils s’étaient promis de se revoir, dans sa poche un morceau de papier avec l’adresse et le numéro de téléphone de la belle brune mal mariée.

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Et maintenant, que vais-je faire ?

Publié le 17 Décembre 2022 par Colonel Spontini

Et maintenant, que vais-je faire ?

Soudain, l'agenda de Raquel Garrido se retrouve allégé, ce qui lui permettra de faire du shopping.

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Pierre Brochand parle d'immigration

Publié le 13 Décembre 2022 par Colonel Spontini

Le 15 novembre, l'ancien patron des services secrets et ambassadeur a prononcé un discours sur l'immigration à l'Amicale gaulliste du Sénat. Un texte exceptionnel que Le Figaro s'est procuré. Pierre Brochand y résume tous les enjeux que fait peser une immigration incontrôlée et propose des solutions.

 

Pierre Brochand a été directeur général de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) de 2002 à 2008, ainsi qu'ambassadeur de France, notamment, en Hongrie et en Israël. Il est intervenu lors d'un colloque de la Fondation Res Publica sur le thème: «Pour une véritable politique de l'immigration».

 

AMICALE GAULLISTE DU SÉNAT

 

Intervention de Monsieur Pierre Brochand, Ambassadeur de France

15 novembre 2022-Salons de Boffrand de la Présidence du Sénat

Monsieur le Président du Sénat,

Monsieur le Président de l'Amicale gaulliste,

Mesdames et Messieurs les sénateurs,

Je vous remercie de votre invitation. Elle est un grand honneur, pour quelqu'un qui a commencé à servir la France sous le Général de Gaulle et en garde, évidemment, une admiration inconditionnelle.

Vous m'avez demandé de parler d'immigration et j'ai suggéré qu'on ajoute « enjeu central ». J'aurais pu aussi bien proposer « enjeu principal ».

Pour deux raisons :

- D'un côté, j'estime que, de tous les défis qu'affronte notre pays, l'immigration est le seul qui menace la paix civile et, à ce titre, j'y vois un préalable à tous les autres.

- D'un autre côté, l'immigration exerce sur l'ensemble de notre vie collective un impact transversal, que je tiens pour globalement négatif.

 

Mais, faute de temps, je négligerai ce second aspect, qui se traduit concrètement par une tiers-mondisation rampante de la société française et sa régression continue dans des domaines clés, tels que l'éducation, la productivité, les services publics, la sécurité, la civilité, etc.

En d'autres termes, si tout ce qui va mal en France n'est pas la faute de l'immigration, loin s'en faut, elle y participe dans une mesure, à mon avis, très sous-estimée.

 

Disant cela, je précise aussitôt que mon sujet n'est pas l'immigration en général, laquelle n'est pas du tout un mal en soi, mais bien l'immigration très particulière que nous subissons depuis 50 ans.

Qui suis-je pour sonner le tocsin ?

A priori, je n'y étais pas destiné, puisque j'ai suivi un parcours exclusivement extérieur. Mais, avec le temps, je me suis aperçu, non sans angoisse, que les dures leçons, tirées de mes expériences au-dehors, s'avéraient de plus en plus pertinentes au-dedans, dès lors que, par le jeu de l'immigration, ce « dehors » était devenu notre « dedans ».

Quels sont ces enseignements ou ces vérités pas toujours bonnes à dire ?

D'abord, que le réel du monde n'est ni joli, ni joyeux, et qu'il est suicidaire de l'insulter, car, tel un boomerang, il se venge au centuple. Ensuite, que, dans l'action, le pire des péchés est de prendre ses désirs pour des réalités. Que, si le pire n'est pas toujours sûr, il vaut mieux le prévoir pour le prévenir. Que les sociétés « multi » sont toutes vouées à se déchirer. Que nous ne sommes pas plus « malins » que les Libanais ou les Yougoslaves, pour faire « vivre ensemble » des gens qui ne le souhaitent pas.

 

Et, enfin surtout, que, dans les relations entre groupes humains, personne ne fait de cadeaux à personne, que les conseilleurs - fussent-ils le New York Times ou SOS Méditerranée - ne sont jamais les payeurs et que, si nous ne prenons pas en charge nos intérêts vitaux, nul ne le fera à notre place.

Deux indications complémentaires :

D'une part, je ne m'embourberai pas dans les chiffres. Car, avec près d'un demi-million d'entrées annuelles et un taux de 40% d'enfants de 0 à 4 ans d'origine immigrée, la cause me paraît entendue sur ce plan.

D'autre part, il est clair qu'à ce niveau-là, nous ne sommes plus dans l'addition de cas individuels - tous singuliers -, mais bien dans la réactivation de puissantes forces collectives, ancrées dans l'Histoire. Si bien que procéder à des généralisations raisonnables - ce que l'on conspue en général sous le nom d'amalgame - n'a en fait, pour moi, rien de scandaleux.

Ceci posé, je diviserai mon intervention en trois parties :

- D'où venons-nous ?

- Où en sommes-nous ?

- Où allons-nous ?

 

1. D'où venons-nous, ou, si l'on préfère, de quelle immigration est-il question ?

Commençons par tordre le cou au « canard », selon lequel la France aurait toujours été un pays d'immigration. Pendant 1000 ans, des Carolingiens à Napoléon III, rien ne s'est produit.

Depuis 1850, en revanche, nous avons connu trois vagues :

- La première a duré un siècle. D'origine euro-chrétienne, discrète, laborieuse, reconnaissante, régulée par l'économique et le politique, elle a représenté un modèle indépassable de fusion réussie.

- La deuxième a commencé dans les années 1970 et n'a fait que s'amplifier depuis. Elle est l'exact contraire de la première.

C'est une immigration de peuplement irréversible, qui n'est calibrée ni par l'emploi, ni par le politique, mais engendrée par des droits individuels, soumis au seul juge national ou supranational. Nous sommes, donc, submergés par des flux en pilotage automatique, « en roue libre », dont les Français n'ont jamais explicitement décidé.

Mais, surtout, l'écart identitaire qui nous sépare des arrivants n'a aucun équivalent dans notre Histoire.

Tous viennent du «tiers-monde», de sociétés hautement défaillantes, et la majorité est de religion musulmane, ainsi qu'originaire de nos anciennes colonies. De plus, tous sont, comme on le dit aujourd'hui, « racisés ».

- La troisième lame a été déclenchée, il y a 10 ans, par le soi-disant « Printemps arabe », dont elle est une des conséquences néfastes. C'est pourquoi elle a d'abord pris la forme d'une crise d'urgence, rapidement devenue permanente, sous l'impulsion d'un nouveau dévoiement du droit, cette fois le droit d'asile, au besoin conforté par le droit de la mer et celui des mineurs.

2. Où en sommes-nous ou « l'état des lieux » ?

Comme pour tout phénomène social, je vais, d'abord essayer d'en prendre une photographie, avant d'en dérouler la dynamique.

On n'a pas compris grand-chose à l'immigration actuelle si l'on n'a pas perçu d'emblée qu'elle était virtuellement conflictuelle, que ces conflits n'étaient pas quantitatifs mais qualitatifs - donc insolubles - et qu'ils s'inscrivaient, in fine, dans le très douloureux retour de bâton anti-occidental, déclenché par la globalisation.

En feignant d'ignorer ce déterminisme, nous avons été assez fous pour réinjecter chez nous les ingrédients des trois tragédies qui ont causé nos pires malheurs dans le passé :

- La discorde religieuse, théoriquement enterrée en 1905

- L’antagonisme colonial, en principe clos en 1962

- Le fléau du racialisme, dont nous pensions être libérés depuis 1945.

S'agissant du religieux, c'est-à-dire l'islam, aucune « méthode Coué » ne me convaincra que cette confession, entièrement et fraîchement importée par l'immigration, ait pu soudain se transformer en homologue du christianisme, enraciné chez nous il y a quinze siècles et depuis longtemps domestiqué par une laïcité, taillée à sa mesure.

D'une part, en tant que croyance, l'islam est une religion « à l'ancienne », un bloc d'hétéronomie, un code englobant de pratiques ostensibles, un pavé de certitudes communautaires, brutalement tombé du ciel dans la mare d'une société post-moderne, qui ne croyant plus à rien, est complètement prise à contrepied par cette effraction foudroyante (il y a aujourd'hui, en France, 25 fois plus de musulmans que dans les années 1960).

D'autre part, en tant que civilisation totale, fière, guerrière, offensive, militante, l'Islam a très mal vécu son humiliation par l'Occident depuis deux siècles. Dès que la globalisation lui en a offert l'opportunité, il s'est réveillé tel un volcan.

 

De cette éruption, nous connaissons les manifestations : djihadisme, salafisme, islamisme, réislamisation culturelle. Tous symptômes désormais présents sur notre sol, comme autant d'expressions crisogènes de l'insatisfaction d'un agent historique « anti-statu quo », qui aspire à l'hégémonie là où il est présent, et, quand il y parvient, ne partage pas notre déférence pour les minorités.

C'est pourquoi, il faut avoir une « cervelle de colibri » - de Gaulle dixit - pour oublier que musulmans et européens n'ont cessé de se disputer, depuis 13 siècles, le contrôle des rives Nord et Sud de la Méditerranée et il faut être bien naïf pour ne pas percevoir, dans les courants de population d'aujourd'hui, une résurgence de cette rivalité millénaire, qui, il convient de le rappeler, a toujours mal fini.

Si, pour sa part, l'antagonisme colonial ne s'est pas estompé 60 ans après, c'est que, là aussi, nous avons été assez stupides pour imaginer, qu'en reconstituant, sous le même toit métropolitain, le face-à-face de gens qui venaient de divorcer outre-mer, on parviendrait à les rabibocher. Erreur fatale, car pas plus que les croyances, certaines mémoires ne sont conciliables.

 

D'où le fait, jamais vu nulle part, d'une immigration à tendance victimaire et revendicative, portée autant au ressentiment qu'à l'ingratitude et qui, consciemment ou non, se présente en créancière d'un passé qui ne passe pas.

Quant au clivage racial, il tient à la visibilité des nouveaux venus dans l'espace public, elle aussi sans antécédent. Ce qui conduit, hélas, à instiller dans les esprits, « à notre insu, de notre plein gré », une grille de lecture ethnique des rapports sociaux, où, par contamination, chacun finit par être jugé sur sa mine. Ce qui conduit aussi, deux fois hélas, à inoculer chez nous le virus mortel du modèle américain et, pire encore, de son hystérisation wokiste. Glissement ô combien frauduleux et scandaleux, puisqu'il donne à penser à nos immigrés qu'ils sont, eux aussi, des descendants d'esclaves. De là, ce que l'on pourrait appeler le « syndrome Traoré », dont il ne faut surtout pas minimiser les ravages.

Mais, non contents d'avoir ranimé ces trois incendies mal éteints (religieux, colonial, racial), nous avons réussi l'exploit d'en allumer trois nouveaux, inconnus de notre histoire récente :

- Le premier tient à l'intrusion incongrue de mœurs communautaires d'un autre temps, héritées des pays d'origine et perpendiculaires à notre mode de vie : primauté des liens de sang, système de parenté patrilinéaire, contrôle des femmes, surveillance sociale de la sexualité, endogamie, culture de l'honneur et ses corollaires (justice privée, loi du talion, omerta), hypertrophie de l'amour-propre, inaptitude à l'autocritique. Sans oublier polygamie, excision, voire sorcellerie, etc.

- Autre dissension inouïe : l'alter nationalisme des arrivants, qui à la différence de leurs prédécesseurs, entendent conserver la nationalité juridique et affective de la patrie d'origine, très largement mythifiée. Avec tous les dégâts que peut causer cette dissociation rare entre passeport et allégeance. Souvenons-nous, tous les jours, du coup de tonnerre fondateur que fut le match de football France/Algérie en 2001, tristement révélateur de l'émergence surréaliste de « français anti-français ».

- Enfin, « cerise sur le gâteau », ces communautés venues d'ailleurs n'ont pas seulement des contentieux avec la France, mais aussi entre elles : maghrébins/sub-sahariens ; algériens/marocains ; turcs/kurdes et arméniens ; afghans, tchétchènes, soudanais, érythréens, somaliens, pakistanais, prêts à en découdre, chacun de leur côté ; roms rejetés par tous. Sans omettre l'effrayant parachutage d'un antisémitisme de type oriental. Ainsi, sorte de « cadeau bonus », nous assistons au spectacle peu commun d'un territoire, transformé en champ clos de toutes les querelles de la planète, qui ne nous concernent pas.

Voilà pour la photo, pas très réjouissante, je le reconnais. J'en viens à la « dynamique », qui ne l'est guère davantage.

Elle se résume à trois théorèmes très simples :

Un. Les courants d'immigration sont cumulatifs. Aux effets de flux s'ajoutent des effets de stock, qui à leur tour, génèrent de nouveaux flux.

Deux. Ces courants obéissent aussi à des effets de seuil. Au-delà d'un certain volume, ils changent de nature et de signe. D'éventuellement positifs, ils passent à négatifs.

Trois. Ce seuil de saturation est d'autant plus vite atteint que le fossé entre société de départ et d'arrivée est profond.

Tentons d'appliquer ces formules dans le concret. Quand un groupe humain projette d'emménager chez un autre, il n'y a que cinq possibilités :

- (1) L'interdiction

- (2) L'absorption

- (3) La négociation

- (4) La séparation

- (5) L'affrontement

L'interdiction est tout simplement la mise en œuvre du « principe de précaution », que l'on invoque, à satiété, dans quasiment tous les domaines. Sauf apparemment celui de l'immigration, où il aurait pourtant consisté à bâtir une digue avant que n'arrive le tsunami. Autant dire qu'un projet aussi volontariste ne nous a même pas traversé l'esprit.

L'absorption ou assimilation, par ralliement asymétrique et sans retour à la culture d'accueil, fut longtemps notre paradigme. Nous l'avons abandonné en rase campagne, par renoncement à nous-mêmes, mais aussi par nécessité, car les volumes que nous avons admis ont très vite excédé ce seuil très exigeant.

C'est pourquoi, nous avons cru pouvoir nous rabattre sur l'option 3.*

 

La négociation ou l'intégration est, en effet, une position intermédiaire, où chacun fait un pas vers l'autre, mais où les immigrés gardent leur quant à soi : un pied dedans, un pied dehors. En bref, un compromis qui n'efface pas les divisions, mais espère les transcender par accord tacite sur une plateforme minimale : le respect des lois et l'accès à l'emploi.

Cependant, en pratique, il s'avère que le plus gros des efforts est à la charge du groupe qui reçoit - c'est-à-dire nous -, aussi bien en termes financiers (politique de la ville, protection sociale), que de dérogations à nos principes (discrimination positive, mixité imposée, quotas).

Au final, certes, les intégrés sont plus nombreux que les assimilés, car le seuil de tolérance est plus élevé dans leur cas. Pour autant, ils ne sont pas majoritaires et je crains, surtout, que le contrat implicite, passé avec eux, ne soit qu'un CDD, susceptible de ne pas être renouvelé à échéance, si les circonstances changent et, notamment, si les immigrés et descendants franchissent - ce qui est inéluctable en prolongeant les tendances actuelles - la barre des 50% de la population.

 

Ainsi, ces résultats, pour le moins mitigés et ambigus, ont ouvert un boulevard à l'option 4 : la séparation, qui, dans les faits, est la preuve par neuf de l'échec des trois précédentes. Car, au fond, le scénario sécessionniste est la pente la plus naturelle d'une société « multi ».

Quand des groupes répugnent à vivre ensemble, ils votent avec leurs pieds, se fuient, se recroquevillent, comme autant de répliques du séisme initial qu'est la migration. Se constituent, alors, ce qu'on appelle des diasporas, soit des noyaux durs introvertis, formés de populations extra-européennes, ni assimilées, ni intégrées et à tendance non coopérative.

Ces isolats territoriaux vont inéluctablement développer une double logique de partition et d'accélération.

Partition, par inversion de la pression sociale, dans le sens de la conservation et de la transmission des codes culturels d'origine, y compris - ce qui est stupéfiant - à travers la réislamisation des jeunes. Soit une espèce de contre-colonisation, par le bas, qui ne dit pas son nom.

Accélération, car les diasporas, dont le taux d'accroissement naturel est déjà très supérieur à la moyenne nationale, deviennent, à leur tour, génératrices d'immigration par aspiration juridique et aide à l'accueil.

D'où, en fin de compte, deux évolutions effarantes, là encore, jamais observées :

- Une immigration, qui diverge au fil des générations

- Une immigration, qui s'autoproduit en boule de neige

 

De sorte qu'entre cet « archipel » et le reste du pays, s'effondre la confiance sociale, fondement même des sociétés heureuses. Là où la défiance devient système, ne tarde pas à disparaître l'altruisme au-delà des liens de parenté, c'est-à-dire la solidarité nationale. À commencer par son navire amiral : l'État providence, dont la perpétuation exige un minimum d'empathie entre cotisants et bénéficiaires. L'économiste Milton Friedman avait coutume de dire, à mon avis fort justement, que l'État providence n'était pas compatible avec la libre circulation des individus.

Or, face à ces micro-contre-sociétés, nous sommes comme tétanisés. Nous y repérons, non sans raison, autant de cocottes-minute, dont nous redoutons avant tout qu'elles n'explosent en même temps. Et pour l'éviter, nous sommes prêts à passer du compromis aux compromissions, en surenchérissant sur les concessions déjà consenties pour promouvoir l'intégration. C'est ce que l'on appelle, par antiphrase, les « accommodements raisonnables », lesquels ne sont rien d'autre que des reniements en matière de liberté d'expression, de justice pénale, d'ordre public, de fraude sociale et de laïcité ou sous forme de clientélisme subventionné.

Tous ces arrangements au quotidien ont beau se multiplier, ils ne suffisent pas à acheter la paix sociale et c'est alors que « ce qui doit arriver arrive » : quand plusieurs pouvoirs sont en concurrence ouverte, sur un même espace, pour y obtenir le monopole de la violence mais aussi des cœurs et des esprits, c'est le 5e cas de figure qui se réalise.

L'affrontement. Ce que l'on désigne pudiquement par l'expression « violences urbaines » et dont on connaît bien la gamme ascendante.

Au plus bas, les incivilités courantes qui, parce qu'impunies, incitent à aller plus loin. Un cran au-dessus, une surdélinquance, vécue in petto, comme une juste compensation. Puis, des manifestations de protestations ou même de célébrations, qui s'achèvent en razzia ou en vandalisme. Un degré plus haut, des émeutes qui s'en prennent à tout ce qui incarne la France, y compris pompiers et médecins. Émeutes qui dégénèrent désormais en guérillas de basse intensité, sorte d'intifada à la française ou de « remake » en mineur des guerres coloniales. Avec comme point culminant de ce continuum, le terrorisme djihadiste, dont notre pays est la principale cible en Europe.

Au vu de ce bilan, mon sentiment est que, si nous restons les bras croisés, nous allons au-devant de grandes infortunes et de terribles déconvenues.

3- Où allons-nous ? Que faire ?

Il y a deux préconditions à l'action : la transparence statistique et le rejet du discours intimidant.

Si l'on veut s'attaquer à un problème, il est indispensable d'en cerner la dimension réelle. Or l'appareil statistique, centré sur le critère de la nationalité, ne permet pas d'évaluer toutes les répercussions d'un phénomène qui lui échappe largement. C'est pourquoi, il est impératif de nous orienter vers des statistiques et projections dites «ethniques», dont l'interdiction n'est qu'une hypocrisie et une coupable préférence pour l'ignorance, donc le statu quo.

Quant au discours intimidant, c'est l'incroyable prêchi-prêcha que nous servent les médias, les ONG, les « people », et dont la seule finalité est d'organiser l'impuissance publique.

Ces éléments de langage, que l'on nomme à tort « État de droit », ne sont, à mes yeux, que le reflet d'une idéologie qui, à l'instar de toutes les idéologies, n'a rien de sacré. À ceci près qu'elle est dominante depuis 50 ans.

 

Son dogme central, nous le savons tous, est de faire prévaloir, partout et toujours, les droits individuels et universels d'êtres humains présumés interchangeables, amovibles à volonté, dans un monde sans frontières, où tout serait parfait, sans l'obstacle anachronique de l'État national, « ce pelé, ce galeux d'où vient tout le mal », car seul théoriquement capable de dire non à cette chienlit. Raison pour laquelle on s'est très soigneusement employé à le rééduquer, en l'amputant de ses bras régaliens pour le conformer au nouvel idéal : laisser aller, laisser courir, laisser tomber.

Le plus grave est que cette utopie ne se préserve des assauts du réel qu'en usant d'un moyen méprisable : le chantage. Le chantage au racisme, qui, à coups de fatwas, promet la mort sociale à tous ceux qui s'aviseraient de sortir la tête de la tranchée. Or, cette doxa, en forme de conte de fées, il ne faut pas craindre de proclamer qu'elle est fausse et incohérente.

Fausse, car, s'il est vrai que les immigrés entrent comme des individus, il est non moins effectif qu'ils s'implantent comme des peuples. Et c'est précisément cette évidence limpide que le narratif officiel nous interdit de voir.

 

Incohérente, car ladite doxa ne cesse de se contredire. On nous raconte simultanément que l'immigration n'existe pas, qu'elle existe et que c'est une bénédiction, qu'elle a toujours existé et que c'est une fatalité, que l'accueillir est un devoir moral, mais qu'elle va payer nos retraites et pourvoir aux emplois dont les Français ne veulent pas, que si elle cause la moindre difficulté, c'est parce qu'elle est mal répartie dans l'espace ou que l'on n'y consacre pas assez de moyens budgétaires, car ce n'est qu'un problème de pauvreté, d'urbanisme ou, au pire, d'immigration irrégulière.

Mais, en bout de course, on finit toujours par se heurter au même argument massue : « ne mettez pas d'huile sur le feu, car vous faites le jeu d'un tel ou d'un tel ». Argument qui est, sans doute, le plus extravagant de tous, en ce qu'il reconnaît qu'il y a bien un incendie en cours, mais qu'il est préférable de le taire pour des raisons qui n'ont rien à voir.

Rendus à un tel niveau d'absurdité, nous nous retrouvons face à une trifurcation :

- Soit on prend au sérieux ces fariboles et on laisse tout filer : on roule vers l'abîme, en appuyant sur l'accélérateur,

- Soit on reste benoîtement dans les clous et on se borne à accompagner le phénomène, en votant, tous les 3 ou 4 ans, des lois qui font semblant de traiter de l'immigration, mais qui, en fait, relèvent de sa gestion administrative et technocratique. Ce n'est que reculer pour mieux sauter,

- Soit on réussit à se dépêtrer de notre camisole et à reprendre, en faisant enfin preuve de volonté politique, le volant du camion fou qui roule tout seul depuis 50 ans.

Vous avez deviné que mon choix est évidemment le dernier. Mais plus précisément ?

L'immigration - il est facile de le comprendre - fonctionne comme une pompe qui refoule d'un lieu et aspire vers un autre. Nous ne pouvons rien, ou presque, pour empêcher le départ. Nous pouvons tout, ou presque, pour décourager l'arrivée.

D'où 6 grands axes :

  1. Envoyer, urbi et orbi, le message que le vent a tourné à 180°, en s'attaquant bille en tête à l'immigration légale, qu'il convient de diviser au moins par 10.
  2. Trancher à la même hauteur l'accès à la nationalité, qui doit cesser d'être automatique.
  3. Contenir l'immigration irrégulière, en divisant par 20 ou 30 les visas, y compris étudiants, accordés aux pays à risques, en n'acceptant plus aucune demande d'asile sur notre territoire, en abolissant toutes les récompenses à la tricherie (aide médicale d'Etat, hébergement, régularisations, débarquement de navires « sauveteurs »).
  4. Atténuer l'attractivité sociale de la France, en supprimant toutes les prestations non contributives aux étrangers, HLM compris, et en limitant à 3 enfants, par famille française, des allocations familiales, revalorisées sans conditions de revenus.
  5. Dégonfler les diasporas, en réduisant les types, durées et nombres de titres de séjour et en excluant les renouvellements quasi-automatiques.
  6. Muscler notre laïcité « chrétienne » pour l'adapter au défi très différent de l'islam, en ne neutralisant plus seulement l'Etat et l'école, mais aussi l'espace public, les universités et le monde de l'entreprise.

Si ces propositions s'inscrivent dans le cadre du droit existant, tant mieux, sinon il faudra le changer, quel qu'en soit le prix. Car le retournement proposé relevant désormais du salut public, sa férocité n'est que la contrepartie du temps perdu.

Je viens de vous présenter un diagnostic. À savoir que, si nous persistons dans notre aveuglement, nous allons vers un pays, où, a minima et par implosion lente, la vie ne vaudra plus la peine d'être vécue, ou, a maxima, vers un pays, où, à force d'explosions, on ne pourra plus vivre du tout.

On peut ne pas partager cette évaluation et, dans ce cas, j'aurais parlé pour ne rien dire. Mais on peut aussi y adhérer et, dans ce cas, les mesures avancées sont notre dernière chance.

J'ai conscience de ce que certains d'entre vous ont pu me trouver excessif, alarmiste, irréaliste, sans nuance, ni générosité, que sais-je encore.

 

Je vous accorderai volontiers deux autres défauts. D'une part, mon caractère peut être qualifié d'obstiné, en ce que je n'accepterai jamais d'affirmer qu'il fait nuit en plein jour. D'autre part, c'est vrai, je suis obsédé, mais mon obsession est uniquement tournée vers la France qui vient, à échéances de 10, 20, 30 ou 40 ans : celle de nos enfants et petits-enfants, auxquels notre devoir élémentaire est de ne pas léguer un pays chaotique, alors que nous l'avons reçu de nos aînés comme un cadeau magnifique.

Ultime question, dont je suppose que nous nous la posons tous, de temps à autre : que ferait le Général de Gaulle, dans le monde si différent d'aujourd'hui ?

Nul ne le sait, mais je suis personnellement convaincu de deux choses : s'il avait été au pouvoir au cours du dernier demi-siècle, il ne nous aurait jamais mis dans le pétrin que j'ai décrit ce soir et s'il ressuscitait, je redoute qu'il ne me prenne pour un modéré bien timoré.

Merci de m'avoir écouté.

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N'oublie pas ta douleur, vingtième chapitre

Publié le 3 Décembre 2022 par Colonel Spontini

N'oublie pas ta douleur,  vingtième chapitre

20

 

Grâce à l’algorithme de Clayton, on peut simuler « un coup de tatane sur la machine », comme on le faisait, autrefois en vrai, pour démarrer une automobile.

 

 

Les nuits sont fraîches dans le désert, parfois même glaciales. Si le corps pouvait faire la moyenne entre le jour et la nuit, il y aurait plus de monde dans le désert. Mais les moyennes, pures constructions humaines, sont souvent trompeuses  car elles ne rendent pas vraiment compte des réalités physiques. En tout cas, à 6 heures du matin, il n’est pas superflu de se couvrir d’une petite laine. Ashkook porte sa veste à franges et Othon a mis un blouson sur son tee-shirt. Ils s’activent sur la terrase. Les tables et les chaises d’hier soir sont dans un coin et, à la place, un filet métallique tendu sur un cadre ciculaire et posé, par des pieds, sur un épais tapis d’aluminium. Othon est en train de déverser dans le filet le contenu de cartons apportés-là auparavant. Je vois des dossiers, des feuilles de papier, des carnets et même des cassettes. Les couleurs des papiers témoignent d’anciennetés plus ou moins prononcées, du blanc récent à des jaunes foncés des années cinquante. Il y a des listings, des lettres de toutes tailles, des correspondances manuscrites, des cartons d’invitation, des cartes postales. Je vois même passer des diplômes et des documents officiels, certains avec des tampons rouges « Highly confidential ». Ashkook arrive avec de nouveaux cartons et Othon les ouvre pour les vider dans le panier. Ensuite, à l’aide d’un cutter, il les met en deux dimentions, au terme d’un pliage, et les entasse un peu plus loin.

— Ici tout est précieux, je ne vous dis pas le prix de la livraison de la moindre babiole. On peut même se faire livrer par avion ou par hélicoptère, les américains n’ont jamais reculé devant rien, mais c’est encore plus cher.

— Vous pourriez recycler tout.

Je commence à deviner son intention.

— Oui, mais je ne le ferai pas. Je vais faire, comme une cérémonie, en quelque sorte, comme une sonnerie aux morts ou comme… un enterrement. À la mode hindoue…

Il relève la tête pour me regarder avec un sourire.

Martha arrive. Elle examine les archives devant elle et s’empare d’une page. Elle lit puis sourit elle aussi.

— Bon, on va faire une première fournée.

Othon, d’un signe de tête, signifie au Navajo de passer à la suite. Celui-ci va chercher un bidon d’essence qu’il déverse, en partie, sur le tas de documents. Puis il prend un Zippo dans sa poche (pour allumer les calumets ?). Autre signe de tête et me voilà avec le briquet dans la main.

— Moi !

Silence, on me répond par le silence. Un silence qui vient s’ajouter au silence du désert.

Bon. Ainsi décide le destin. Je prends une feuille pleine d’équations encadrées d’une écriture serrée et délavée. J’en fais une mêche et l’enflamme.

Je la jette sur le tas qui s’enflamme à son tour en dégageant une onde de chaleur qui nous fait reculer.

 

J’assiste à la disparition du passé d’Othon Klugermann et de celui de Martha ….

La chaleur de la nouvelle journée qui nous attend vient s’ajouter à celle du brasier et, au bout de quelques minutes, s’y substituer alors que les cendres sont venues recouvrir la surface d’aluminium. Me revient en mémoire le bûcher de la place de Grève où l’on brûla aussi du papier, les pages des livres de Bernard Mandeville.

— Pourquoi faites-vous cela Othon ?

— Pourquoi ferais-je le contraire ?

On déplace le filet, une fois refroidi et on évacue les cendres. Ensuite, une deuxième fournée commence à s’entasser dans l’attente de son passage à l’état de fumée.

Au bout de cinq bûchers, la totalité des archives professionnelles de Klugermann et de …. n’exsistent plus. Je les regarde dans le plein jour maintenant installé et ne détecte ni joie ni nostalgie ni rien du tout, comme pour une décision mûrie depuis tellement longtemps que le passage à l’acte n’est plus qu’une formalité.

— Voilà Léonard, maintenant si on te pose la question, tu pourras témoigner qu’il ne reste plus rien de mes travaux ni de ceux de Martha.

— Mais… vous avez … heu… découvert des choses de la plus haute importance, comme la fausseté de la conjecture de Riemann, les conséquences sont incalculables, invraissemblables, inimaginables…

— Impensables aussi, mais un autre s’en chargera.

— Oui, mais l’algoritme de Bach et … peut se tromper… l’autre jour un avion a failli s’écraser et…

— Et quoi ? Vous avez entière liberté pour dire à qui veut l’entendre que la conjecture est fausse parce que je l’ai démontré.

— Personne ne me coira.

— C’est le premier feu.

— Pardon ?

— Le premier feu que nous avons fait a brûlé la démonstration.

— Et dans les autres ?

— C’est Martha qui a trouvé quelque chose de bien plus intéressant.

— Tu m’as aidée Othon chéri, on a trouvé tous les deux.

— Martha a toujours eu trop de bienveillance à mon égard.

Je la vois sourire paisiblement.

Je ne peux cependant m’empêcher:

— Mais ?

— Moi aussi j’étais impatient autrefois et je dois dire que cela ne m’a pas mené bien loin. Mais je comprends, bien sûr votre curiosité. Vous partez demain n’est-ce pas ?

— Heu, oui.

— Bien d’ici là, Askook va vous emmener à la chasse, vous verrez c’est passionnant.

— À la chasse ?

— Oui, vous cuisinerez votre gibier.

Je vois qu’il serait vain de protester ou de décliner l’offre. Je réponds donc:

— Avec des armes à feu ?

— Non, avec des arcs.

Illico je me dis qu’il est douteux que je rapporte le prochain repas, sauf si le Navajo remplit le caddie.

Je me retrouve donc avec un professeur muet dont la pédagogie ne s’exprime que par des gestes. Remarquez qu’il est plus facile d’enseigner ainsi le tir à l’arc que la philosophie analytique. Au terme d’une heure d’exercices où je laisse une partie de la peau de mes doigts, nous partons avec une gourde et quelques flèches dans les immensités du désert. Comment imaginer que des bestioles acceptent de vivre dans cet enfer et, que de surcoît, elles acceptent de se faire trouer la peau par une flèche ? Ashkook me montre, toujours par l’exemple, comment marcher sans bruit et après un temps d’acclimatation, je suis aussi silencieux que lui. Voilà un acquis utile, mais dans l’immédiat, s’il n’effarouche pas les êtres vivants du coin, il ne les fait pas non plus sortir de leurs tanières. Le quidam éthéré que je suis devenu continue de suivre le Navajo sans paroles. L’ombre étant une denrée rare, il devient vite insupportable de continuer ainsi en plein soleil, mais comme il est exclu de m’adresser à mon compagnon au moyen du langage, j’essaie de lui signifier mon désarroi par des gestes. Son exprssion inexpressive m’indique que ma tentative est en train d’échouer. Et voilà que je me remets à évaluer mes chances de survie avant la nuit. Soudain, il me fait signe d’aller me dissimuler derrière un rocher. Tant mieux, c’est à l’ombre. Mais je n’ai pas le temps de jouir des 45°, meilleurs que les 60° que je viens de quitter, qu’il m’enjoins d’utiliser mon arc. J’obéis mécaniquement étant donné que la plupart de mes fonctions vitales ont disjounctés. Je pointe ma flèche vers quelque chose qui bouge et Ashkook bande aussi son arc. Je tire et j’entends les cris de souffrance d’une bête. Pauvre bête. Le Navajo tire à son tour, les cris cessent. Pauvre bête, au moins elle ne souffre plus. Il va récupérer un cadavre couvert de poils de la taille d’un gros castor. Bien entedu, je m’abstiens de lui demander le nom puisqu’il refusera de répondre.

Plus tard, Martha m’apprend que c’est un Mulubu que nous nous apprêtons à manger. De la famille des castors mais évoluant dans un écosystème beaucoup moins aqueux. La cuisinière l’a mis en casserole, moi je n’avais pas le cœur à ça. Avec des cactus hoaba, c’est une spécialité du désert que nous mangeons-là. Le vin que nous buvons vient de la vallée de Parras au Mexique, c’est un gros rouge doux comme du velours mais qui doit être ingurgité à petites doses du fait de ses 14°.

— Othon, notre ami part demain et nous lui avons promis de lui révéler hmm…

— Oui, chérie, tu as raison, il est sans doute temps.

— Maintenant qu’il a appris à chasser dans le désert.

— Ah oui, c’est plus important.

— En marchant comme les Navajos, sans faire de bruit.

— Encore plus important, ça lui servira.

— Plus important que quoi ? Dis-je pour entrer dans la conversation.

— Que les idées profondes, répond Othon mystérieusement.

— Ah bon.

— Celles qui sont parties en fumée.

— Je vois.

Martha se tourne vers son mari:

— De toute façon, il n’aura que sa parole.

— Oui, c’est aussi une conjecture.

— On l’a prouvée.

— C’était le dernier bûcher.

— Maintenant ce n’est plus qu’un souvenir dans nos têtes.

— Je m’en voudrais d’être impoli, mais de quoi parlez-vous exactement ?

— Vous n’êtes pas impoli mon cher Léonard mais, en ce qui nous concerne, aujourd’hui, tout cela nous semble loin.

— Chéri, je pense que Léonard a droit à une explication.

— Oui mon cœur, tu as raison.

Ils observent un silence avant d’en dire plus:

— Vous voyez Léonard, la conjecture de Riemann ?

— Oui, autant que possible.

— Comme elle est fausse, eh bien, cela entraîne des conséquences.

— Comme celle sur l’algorithme de Bach et … et, sans vouloir vous froisser, le crash de quelques avions.

— Le Sétif - Marseille ne s’est pas crashé.

— Certes, mais c’était moins une.

— Vous avez raison Léonard, vous avez raison.

— Mais, il se trouve que nous avons étudié une autre conjecture.

— Mathématique ?

— Non, pas du tout, c’est là tout l’intérêt de l’affaire.

— Du moins, l’intérêt que nous avons éprouvé à l’époque.

— Quel genre de conjecture ?

— Dans le domaine des sciences humaines.

— Ah bon, mais, on ne peut rien démontrer de façon indicutable dans les sciences humaines.

— Oui bien sûr, ce ne sont pas les mathématiques mais… il se rouve que nous avons réussi notre démonstration quand-même.

— Démonstration de quoi ?

— De la conjecture de… comment pourrait-on l’appeler Chérie ?

— Tu le sais bien mon lapin.

— Oui, c’est vrai, nous l’avons appelée le conjecture de Mandeville.

— LA QUOI ?

J’ai crié. J’ai crié tellement fort que l’écho est encore en train de circuler dans les falaises au loin.

Othon se met à rire et Martha chantonne.

— Vous voyez Léonard, vous avez bien fait de venir jusqu’ici. Moi, j’ai eu un témoin de l’incinération de mes archives et vous, vous marquez un point dans votre quête de la lettre de Mandeville.

— VOUS L’AVEZ ?

— Hélas non.

— VOUS NE L’AVEZ PAS BRÛLÉE AU MOINS ?

— Non plus Léonard mais je peux vous dire la chose la plus importante de toutes les choses que je vous ai dites en ce lieu: notre conjecture…

— Votre conjecture ?

— Que nous avons démontrée.

— Que vous avez démontrée ?

— Elle est basée…

Entièrement basée, le reprend Martha.

— Entièrement basée sur la lettre de Mandeville.

— Et ….

— Eh oui, la démonstration est, elle aussi, partie en fumée.

— Vous vous souvenez du contenu de la lettre ?

Silence, puis Matha:

— Darling, ne serait-il pas temps d’aller au lit ?

Un animal que seuls mes hôtes seraient capable d’itentifier, se met à hûrler, comme s’il voulait ajouter son grain de sel aux déclarations du couple.

— Mais ?…

Ils se lèvent et se prennent la main:

— Bonne nuit cher ami.

S’il croient que je vais pouvoir dormir après un coup pareil ! Je les regarde, plein d’interrogations dans les yeux.

— Nous avons oublié mon ami, nous avons oublié. Mais ressaisissez-vous et retnez ceci: ce n’est pas vraiment important.

— Mais ?

— La Nature Humaine, vous savez. Une fois qu’on a compris comme elle marche, on éprouve… comment dire ?

— Une sorte de répugnance chéri ? lui dit Matha.

— Oui, c’est ça.

Et ils se retirent.

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